Calais

J'ai vécu une expérience très déstabilisante hier.

Je me suis jointe à un convoi humanitaire du groupe London2Calais et je suis allée à côté du port dans le camp de réfugiés. Ou la Jungle, comme on la surnomme à raison. Je n'y suis pas restée longtemps en réalité : j'ai passé une bonne partie de la journée à l'extérieur pour collecter et stocker des denrées alimentaires. Mais le peu de temps que j'y ai passé, ça m'a fait un sacré choc.

Déjà, je suis arrivée un jour gris et pluvieux. Ca n'a fait que rendre la situation plus dramatique. Il y avait de la boue partout. Et si nous étions préparés à ça, certains habitants du camp n'avaient pas le matériel nécessaire. J'ai même vu un homme en tongs... Les gens vivent dans des tentes, certains ont réussi à construire des cabanes mais ça ne sera pas suffisant pour l'hiver, même si c'est un début.

Ce qui m'a frappé, c'est la ségrégation qui existe dans le camp. Il y a en quelque sorte un "quartier" syrien, un "quartier" érythréen etc... Et ils circulent dans le camp chacun entre eux. Je n'ai pas senti de racisme ou d'irrespect, mais ils ne se mêlent pas plus que ça, c'est tout.

J'ai aussi senti beaucoup de cynisme. D'un autre côté, quand on se retrouve dans une situation comme celle-ci après avoir déjà passé des semaines, voire des mois sur la route, y'a de quoi.

Mais surtout, ce qui m'a fait le plus de mal, c'est de voir les CRS tenter de canaliser une manifestation fasciste devant le camp. Je ne vois pas l'intérêt, même pour quelqu'un qui est opposé à l'immigration, de se poser avec des banderoles et des bombes lacrymogènes devant un camp rempli de personnes en situation précaire. Ca n'a vraiment pas de sens. Et ce n'est pas après eux qu'il faut s'en prendre me semble-t-il. Enfin bref.

J'ai vraiment du mal à comprendre ce que j'ai vu. Pour tout vous dire, c'est exactement ce à quoi je m'attendais donc je n'ai pas été plus surprise que ça. Mais me dire que c'est en train de se passer dans mon pays, qu'il existe une zone de non-droit et de précarité extrême sur notre territoire... C'est pas simple à accepter.